Voir en ligne : www.amnesty.fr - Investissements et Droits Humains
Si la Déclaration universelle des droits de l’homme s’adresse en premier lieu aux Etats, elle affirme aussi que chacun de ses membres et tous les organes de la société ont le devoir de promouvoir les droits et les libertés qu’elle énonce et de garantir leur reconnaissance. Les entreprises et les institutions financières en tant qu’organes de la société doivent donc elles aussi promouvoir et protéger les droits humains notamment au travers de leur politique d’investissement. C’est pourquoi Amnesty International France soutient le film de Jocelyne Lemaire Darnaud –« Moi, la finance et le développement durable » qui est en phase avec son action en faveur d’un investissement responsable de la part des acteurs économiques dans une optique de protection des droits humains.
Amnesty International France s’est engagée dès 2006 aux côtés d’Handicap International dans une action de plaidoyer tendant à faire adopter par les plus grands groupes bancaires et financiers français une politique de non financement des producteurs de mines antipersonnel (interdites par la Convention d’Ottawa, 1997) et d’armes à sous-munitions (interdites par la Convention d’Oslo, 2008).
Saturant et polluant durablement de larges zones, les bombes à sous-munitions (BASM) sont une menace intolérable à la vie et aux moyens de subsistance des populations civiles, non seulement au moment où elles sont larguées, mais aussi après la fin des hostilités. En effet, jusqu’à 30% des sous-munitions n’explosent pas immédiatement à l’impact et deviennent de facto des mines antipersonnel. Elles entravent également l’aide humanitaire et les opérations de maintien de la paix tout en gênant les efforts de reconstruction et de développement après les conflits. Non discriminantes par nature, 98% des victimes recensées de ces armes sont des civils, parmi elles 27% sont des enfants. De la même façon que les mines antipersonnel, ces armes sont de nature à infliger des blessures superflues ou des souffrances inutiles au regard du droit international humanitaire (DIH).
Parallèlement, Amnesty International est engagée depuis 2003 dans une campagne internationale appelée « Contrôlez les armes » tendant à l’adoption d’ici 2012 dans le cadre des Nations Unies, d’un traité international sur le commerce des armes classiques visant à prévenir notamment les transferts d’armes prohibées par le DIH que sont les mines antipersonnel et les bombes à sous-munitions afin qu’elles ne tombent pas dans les mains d’auteurs de graves violations des droits humains.
En 2009, après trois années d’intense campagne d’action et de sensibilisation, AXA, BNP Paribas, BPCE, Natixis, Crédit Agricole et Société Générale avaient tous adopté des politiques publiques d’exclusion de toute forme d’investissement et de financement dans des entreprises liées à la production et au commerce de ce type d’armement. D’autres grands acteurs comme La Banque Postale, Groupama, CNP Assurances ou encore Amundi avaient également adopté, en dehors de la campagne menée par Amnesty International France, une politique similaire.
Dans la suite naturelle de son action Amnesty International France, toujours aux côtés d’Handicap International, a agi de nouveau et avec succès, dès la fin de l’année 2009 pour que la France prévoit cette interdiction du financement à l’occasion de l’examen du projet de loi permettant d’appliquer en droit français la Convention d’Oslo dont elle est partie depuis septembre 2009.
Le 6 juillet 2010, la France annonçait que le financement direct et indirect de la production et du commerce des bombes à sous-munitions était interdit par la loi française. A l’occasion du débat sur le projet de loi portant application en droit français de la Convention d’Oslo sur les armes à sous-munitions, le gouvernement déclarait officiellement que « toute aide financière directe ou indirecte, en connaissance de cause, d’une activité de fabrication ou de commerce de BASM constituerait une assistance, un encouragement ou une incitation tombant sous le coup de la loi pénale ». Cette déclaration venait pour la première fois préciser l’interdiction d’assistance stipulée par la Convention d’Oslo et reprise dans la loi. Elle devrait permettre de s’assurer qu’en France plus personne, petit actionnaire ou grand groupe financier, ne puisse contribuer financièrement au développement de ces armes inhumaines. La France rejoint ainsi la liste des pays qui bannissent le financement des BASM comme la Belgique, le Luxembourg, la Nouvelle-Zélande ou bientôt la Suisse et l’Allemagne. La Convention d’Oslo est entrée en vigueur le 1er août 2010.